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Comment sauver les terres agricoles normandes victimes de l’érosion?

Les sols français, et en particulier les sols normands, permettent de cultiver et donc de nourrir les habitants du territoire. Or, ces sols cultivables sont présents en quantité limitée, et subissent des dégradations dues au dérèglement climatique.

En effet, ce sont les premières victimes de l’érosion. Ce phénomène naturel dégrade les sols sous l’action du vent, de la glace et surtout des pluies. Deux propriétés se combinent pour dégrader la qualité des sols: la battance et l’érodibilité. La battance représente la dégradation de la couche superficielle du sol qui réduit l’infiltration de l’eau de pluie, et donc favorise le ruissellement de l’eau. L’érodibilité définit le niveau de sensibilité du sol à être emporté par le ruissellement.


Sur la carte suivante, nous observons que l’aléa de l’érosion des sols en Normandie est comparable à l’érosion des sols montagneux, qui est relativement élevée. Aussi, cet aléa de l’érosion est d’autant plus important en automne et en hiver.





Or, cet aléa a des conséquences catastrophiques sur les sols. Cela provoque des écoulements de boue massifs, des pertes de terres agricoles qui sont englouties par l’eau, mais également une perturbation du cycle de l’eau qui transporte davantage de polluants.




Source: AESN, 2005


Dans le nord de la France, et particulièrement en Normandie, les terres cultivées sont très vulnérables à cause d’un faible couvert végétal une partie de l’année. Ces sols sont également victimes d’une importante battance à l’origine du ruissellement de l’eau, au lieu de son absorption.


La Seine Maritime est un territoire particulièrement exposé à l’érosion de ses sols.






Pourquoi la Normandie est-elle particulièrement touchée par l’érosion?


L'érosion dépend en effet des propriétés des sols, du relief, de la protection par le couvert végétal, ou encore du climat. Alors, dans une région assez pluvieuse comme la Normandie, avec des sols limoneux, le ruissellement peut engendrer des pertes importantes de terres agricoles, tout en arrachant les plants ou les semis. Les agriculteurs font partie des premières victimes de ce risque. En effet, les pertes en terre dues à l'érosion hydrique représentent environ 2 t/ha/an, surtout dans les régions de grandes cultures intensives comme la Normandie. Cette concentration du ruissellement de l’eau a surtout lieu en automne et en hiver, lors de fortes intempéries dans la région.

Aussi, le désherbage chimique dans les vergers et les champs favorise l’imperméabilité des sols, et donc engendre une concentration des écoulements d’eau. Ajouté à cela la déforestation pour agrandir les surfaces cultivables, les effets du remembrement, la mise en culture de terres sur des pentes fortes, le surpâturage ou encore la présence de sols nus lors d’intempéries, la Normandie est donc un territoire très vulnérable face à l’érosion.


Cette érosion entraîne en effet des coulées de boue massives, qui ont souvent des conséquences importantes sur les habitations et les infrastructures du territoire. Les dégâts provoqués par ces coulées sont à l’origine d’un nombre croissant de demandes d’indemnisation des pouvoirs publics, pour cause de catastrophe naturelle. On observe que 80 800 arrêtés ont été mis en place en France entre 1982 et 2016, en corrélation avec la pluviométrie importante au cours de ces dernières décennies.



Source: ree.developpement-durable.gouv.fr



Alors, comment retrouver des terres normandes perméables permettant de limiter les dégâts?


Nous ne pouvons plus laisser ces terres agricoles se dégrader sous nos yeux sans agir. Certaines mesures simples peuvent avoir d’importants bénéfices sur la qualité de ces sols. En effet, commencer par utiliser moins de produits chimiques, mais aussi revenir à un désherbage mécanique, permettrait de réduire l’imperméabilité des sols, et donc de mieux absorber les écoulements d’eau. Aussi, les agriculteurs pourraient protéger leurs sols avec des résidus de récoltes, ou du fumier par exemple, de façon à recouvrir leurs sols et les protéger des fortes intempéries. Une rotation régulière des cultures permettrait également aux sols de se renouveler et donc d’être plus perméables aux intempéries. Il faudrait également repenser le système d’écoulement des eaux, et mettre en place des haies ou des collecteurs d’eau via des digues le long des parcelles afin d’éviter l’écoulement de boue. Les agriculteurs auraient tout intérêt à s’organiser de manière collective en amont des cultures pour réduire le ruissellement, et aménager les cultures à l’échelle des bassins versants.


Aussi, les pouvoirs publics, sous l’égide du Ministère de la Transition écologique, pourraient avoir un impact positif sur ce territoire en révisant les plans de prévention des risques (PPR) et les documents d’urbanisme tels que le PLU, le SCOT ou encore la carte communale. De plus, en étayant les Schémas d’aménagement et de Gestion des Eaux (Sage), qui définissent les objectifs et les règles pour une gestion intégrée de l’eau au niveau local, et en favorisant les mesures de lutte anti-érosives, les pouvoirs publics pourraient réduire de manière importante les dégâts. Les propriétaires terriens seraient mieux orientés dans leurs décisions d’aménagement, et cela limiterait le risque d’érosion.



Une autre solution efficace possible: le boisement des terres cultivées


Source: Chambre d’Agriculture de Normandie


Les arbres, et la végétation en général, apportent de nombreux bénéfices aux terres cultivées. Les arbres permettent surtout de lutter contre l’érosion de ces sols fragiles.

En effet, la végétation protège les terres de fortes intempéries, et absorbe une partie de l’eau, limitant ainsi le ruissellement directement sur les sols. La quantité d’eau qui pénètre directement dans le sol est donc réduite. Aussi, comme indiqué sur le schéma, les racines permettent de stabiliser le sol, et donc de réduire les écoulements de boue. De plus, les arbres rendent le sol plus poreux, et donc qui infiltre plus facilement l’eau au lieu de la laisser ruisseler.

Aussi, il faut retenir que le boisement est le mode d’occupation du sol le plus absorbant si on le compare à un champ cultivé ou à une prairie. Les végétaux ont besoin de grandes quantités d’eau. Sur des sols limoneux, selon la Chambre d’agriculture de Normandie, la capacité d’infiltration de sols boisés est de l’ordre de 200 mm/ h.

Végétaliser ses terres pour les protéger semble être une solution assez simple, avec d’importants effets pour protéger ces terres et limiter l’érosion.


Or, quels risques présentent ces solutions?


En effet, il faut prendre en compte que ces changements de pratique et de législation ne se feront pas du jour au lendemain. Il va falloir adapter les usages et les mœurs, et cela se fera sur un temps assez long. De plus, il faut être attentif à apporter des solutions adaptées au territoire concerné, c'est-à-dire, en fonction du climat, ou de la pente du sol par exemple, afin d’apporter la solution la plus adaptée.


Aussi, ces installations pour limiter les écoulements, ou pour boiser les cultures, demandent un réel investissement financier et en énergie pour les propriétaires. Ils peuvent faire face à un certain découragement face au changement climatique, qui lui, n’a plus de temps à perdre. De plus, ces installations demandent un entretien régulier et un suivi dans la réalisation des projets. Il faut donc une réelle motivation de la part des agriculteurs et des pouvoirs publics pour mettre ces changements en place.

Le risque majeur qui demeure est que ces projets n’aboutissent pas, et que le réchauffement climatique accentue la perturbation du cycle de l’eau, et donc que ces aménagements n’aboutissent à rien de concret


Alors, quelles étapes sont nécessaires au bon fonctionnement de cette solution?


Pour sauver nos terres normandes et notre cher paysage, voici les 3 étapes non négligeables afin d'assurer une transition dans de bonnes conditions:


  1. Revoir la législation concernant les risques d’érosion en accord avec les pouvoirs publics.

  2. Aider et encourager les agriculteurs à revoir leurs modes de production, via des aides financières et un suivi régulier.

  3. Encourager un boisement durable des terres agricoles, en choisissant des espèces adaptées à chaque type de sol, en soignant la plantation, en pensant à un accès simple pour la circulation et pour l’entretien.


Camille Forêt













Sources:








→ L’érosion des sols Véronique Antoni et Frédéric Darboux 2009



- Le décret d’application n°2005-117 du 7 février 2005 du volet « risques naturels » de la loi n°2003-699 du 30 juillet 2003 relative à la prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des dommages et le décret n° 2007-882 du 14 mai 2007 :


- Portail de la prévention des risques majeurs du Ministère en charge de l’Ecologie : http://www.prim.net/cgi_bin/professionnel/decretsloirisques.pdf


- Site légifrance :

http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000420195&dateTexte= http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000000821509&dateTexte=



AUZET A.V. (1987) - L'érosion des sols par l'eau dans les régions de grande culture : aspects agronomiques. Centre d'études et recherches éco-géographiques, ministère de l’Environnement / ministère de l’Agriculture, 60 p.


BUSSIERE M. (1996) - L'érosion des sols cultivés en France: manifestation, coûts, remèdes. Mém. D.E.S.S., Univ. Picardie Jules Verne, 136 p.


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