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Covid-19 : le défi des relocalisations en France

Lors de la première vague de la pandémie du coronavirus, les hôpitaux français ont vite été confrontés à des stocks "sous tension", non seulement en termes de médicaments, mais également pour l'équipement médical. Dans l'urgence, les acheteurs publics se sont livrés à une guerre d'enchères pour obtenir des masques auprès de vendeurs profitant d'une demande très supérieure à l'offre. La crise sanitaire a définitivement mise en lumière la dépendance de la France à l'égard de l'Asie. Elle a laissé la place a une prise de conscience : le pays ne produit plus le matériel médical le plus basique. Le relocalisation de la production s'avère cruciale, et ce d'autant plus à l'heure où les hôpitaux nécessitent d'être mieux prémunis contre les risques sanitaires futurs.


 


A la sortie du confinement du printemps dernier, le gouvernement reconnaissait la nécessité de relocaliser les industries "stratégiques", parmi lesquelles figurent celles de la santé.


L'Etat avait lancé en mars dernier un appel à manifestation d'intérêt (AMI) dans le but de faire émerger des sites de production de meltblown, le matériau de filtration utilisé pour la fabrication des masques FFP2 et FFP3, ceux de protection des personnels soignants. La société Meltblo France, créée en juin 2020, a répondu à cet appel et va investir 4,1 millions d'euros à Brognard (Doubs) pour relocaliser en France la production de meltblown.


Si le ministère des Finances a mis en place des dispositifs d'aides pour inciter les entreprises à installer leur production en France, à l'instar de Sanofi et de Tronico, ce dernier développant des dispositifs médicaux électroniques, la souveraineté économique est loin d'être acquise.


En effet, en matière de tests, la PME rennaise NG Biotech annonçait en mars 2020 produire le premier test rapide français de détection du Covid-19. Afin de soutenir l'entreprise française, la Direction générale de l'armement ainsi que la Région Bretagne lui notifiait chacune une commande d'un million d'euros de tests sérologiques, accompagnée d'une aide au développement pour mettre au point un second kit de test. De plus, le label "made in France" semble avoir été décisif dans le choix de NG Biotech par l'Etat pour la commande de 1,5 million de tests annoncée par Frédérique Vidal le 5 juin 2020. Si NG Biotech assemble ses test en France, l'entreprise a toujours besoin de bandelette en nitrocellulose venues de Chine et de boîtiers réalisés par un sous-traitant australien pour les fabriquer.


Test de diagnostic rapide NG-Test développé par NG Biotech


Environ un tiers des appels d'offres publiques sont remportés par des entreprises dont les masques sont importés.


Alors que la France produit des millions de masques, et que le gouvernement incite à acheter français, des collectivités s'approvisionnent toujours à l'étranger. C'est ce que révèle une enquête menée par France Info en s'appuyant sur le Bulletin officiel des annonces de marchés publics (BOAMP), dans lequel chaque région, département, métropole ou institution publie une offre publique lorsqu'elle veut acheter pour plus de 90 000 euros de masques. Résultat : près d'un an après le début de la crise, le secteur public commande toujours souvent auprès de sociétés dont les produits viennent de l'autre bout du monde.


De fait, les cinq entreprises françaises dont les noms reviennent le plus fréquemment importent leurs masques de pays comme la Chine, le Vietnam ou la Tunisie. C'est le cas de NM Medical, filiale de Novomed, dont les masques en provenance de Chine sont livrés au Sénat, au Conseil général du Var, de celui des Bouches-du-Rhônes et de la ville de Lens. De même, les masques lavables de la société Lamy SAS, produits au Vietnam, seront également acheminés au Conseil général du Var, de l'Oise et de la Métropole Nice Côte d'Azur.



La sous-traitance, toujours de mise.


Néanmoins, de nombreuses entreprises de la santé souhaitent relocaliser leur production sur le territoire français. Ainsi, l'entreprise alsacienne de matériel médical Biosynex souhaite doubler la proportion de ses produits fabriqués en France. En 2019, seules 13% de ses produits, comme les tests de diagnostic, étaient fabriqués sur place, avec tout ou partie de composants importés. Pour le PDG Larry Abensur, le "déclic" s'est produit en avril 2020. La société n'arrive plus à s'approvisionner en tests Covid chez son fournisseur chinois, et réalise à quel point elle est dépendante. De plus, avec la crise sanitaire, les prix des tests à l'import et les coûts de transport ont flambé, sans compté le casse-tête des douanes et l'impact des tensions sino-américaines.


"C'est une culture qu'il faut réintégrer. On sous-traite souvent par confort", estime le PDG Larry Abensur

Dans le cadre de son plan de relance, l'Etat a prévu une enveloppe de 850 millions d'euros dédiée à la relocalisation. Pour accompagner la relocalisation, l'une des solutions prônée au niveau européen est également le projet de taxe carbone. Cette taxe vise à pénaliser l'importation en Europe de biens à la production très émettrice de gaz à effet de serre. Si la Commission l'impose, elle rendra la dilatation des chaînes de production nettement moins intéressante, mais pénalisera également des exportations et les producteurs étrangers.


Clara Cuny



Sources :

https://www.macommune.info/relocalisation-du-meltblown-pour-la-fabrication-de-masques-en-france-une-entreprise-de-montbeliard-se-distingue/

https://www.lefigaro.fr/societes/relocalisations-la-sante-l-une-des-priorites-post-covid-20210309

https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/masques-sanitaires/masques-malgre-la-production-made-in-france-le-secteur-public-s-approvisionne-toujours-a-l-etranger_4262439.html

https://www.francetvinfo.fr/sante/maladie/coronavirus/deconfinement/coronavirus-le-test-francais-commercialise-par-la-societe-ng-biotech-est-en-fait-largement-chinois_4040297.html

https://www.la-croix.com/Economie/Relocalisation-crise-Covid-mode-demploi-2020-09-13-1201113808


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