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Quand la crise du COVID 19 lève le voile sur la situation précaire des sans abris en France

  • Etudiant
  • 26 avr. 2020
  • 5 min de lecture

Dernière mise à jour : 27 avr. 2020

Suite à la déclaration du Président de la République du 16 mars 2020 plongeant la France dans une période de confinement inédite, des millions de Français se sont retrouvés du jour au lendemain enfermés chez eux pour endiguer la propagation du Coronavirus. Néanmoins, ce confinement a permis de lever un voile sur une situation inégalitaire, qu'on évite parfois mais pour laquelle on ne peut plus désormais détourner les yeux. Aux coins des rues, dans les encoignures de portes, le quotidien des sans abris nous saute aux yeux, sans qu'il n'y ait une foule humaine de passants pour le cacher. Mais alors qu'on ne cesse d'interpeller les Français pour qu'ils restent à la maison, que se passe-t-il pour ceux qui n'ont pas de « chez eux » ? Et qu'en est-il de leur exposition au virus ?


Source : Mykolas.info, dessins de presse, illustrations, caricatures


* Les SDF en France aujourd'hui

Aujourd'hui, le nombre de Sans Domicile Fixe (S.D.F) en France n'est pas réellement connu, il oscille généralement entre 145 000 et 200 000 personnes. Des chiffres encore flous mais surtout alarmants d'autant plus que le nombre de femmes et d'hommes qui dorment à la rue ne cesse d'augmenter chaque année.

L’État français se veut conscient de cette réalité et a déjà pris des mesures pour soulager leur situation quotidienne. Un « Plan Logement d'abord » a été récemment mis en place et a pour ambition de diminuer de manière significative le nombre de personnes sans domicile fixe d’ici 2022, en privilégiant des solutions pérennes de retour au logement. Mais en attendant que ce plan ne fasse réellement effet, le gouvernement s'appuie avant tout sur des solutions d'hébergements d'urgence temporaires, comme avec la mise en place d'un "Plan hivernal" chaque année, visant à augmenter les capacités d’accueil des centres d'hébergement à 14 000 places. Or, comme le dénoncent souvent les associations, les efforts demandés à l’État ne doivent pas se concentrer uniquement sur des périodes particulières, car c'est bien toute l'année que les S.D.F ont besoin d'aide et d'un foyer.


* Une population impactée plus fortement par le virus

Cette situation est d'autant plus problématique ces derniers jours en raison de la propagation du COVID 19. En effet, les sans abris sont beaucoup plus vulnérables au risque de maladie. Sujets à des maladies chroniques, des troubles cardio-vasculaires et manquant de suivis médicaux, ils sont extrêmement fragiles face à une potentielle exposition. A cela s'ajoutent une méconnaissance des gestes barrières et des conditions d'hygiène dégradées augmentant ainsi leur vulnérabilité face au virus. La crise du COVID 19 ne fait donc qu’exacerber les inégalités sociales déjà existantes entre les personnes, en mettant donc en première ligne de mire ces populations vivant chaque jour dans des conditions précaires.

Néanmoins, l’État français a tout même cherché à apporter des solutions pour ces populations. La prolongation du "Plan hivernal" a par exemple été décidé pour deux mois, de plus il a été décidé de la création de nouveaux centres d'hébergement, de centres de desserrement pour chaque région afin d'accueillir les sans abris contaminés par le virus. Aux actions de l’État s'ajoutent celles des associations qui continuent les maraudes et la distribution de nourritures et kits sanitaires pour les préserver du virus. On peut ainsi s'appuyer sur le bel exemple de la ville de Nantes et du Wattignies Social Club, tiers lieu basé dans un ancien garage de l'île de Nantes, qui dès le début du confinement ont proposé leur aide aux sans abris, en se basant sur les leçons tirées du virus H1N1.Ce collectif d'acteurs a su donc faire preuve de solidarité et de résilience, en se servant des leçons du passé. Une résilience qui n'est cependant pas partagée sur l'ensemble du territoire où la plupart des villes ont réagi avant tout dans l'urgence pour protéger les SDF.

La réponse globale apportée face à cette crise inédite et face à la situation des sans abris est donc bien peu suffisante. Cette insuffisance peut trouver une explication dans le fait que les moyens nécessaires pour protéger cette population fragile n'ont pas été fourni en amont. Les aides apportées aux sans abris restant avant tout dans le domaine de l'urgence et des circonstances exceptionnelles. Or la résilience ne peut se faire réellement en oubliant une partie de la population. Elle ne peut pas non plus se construire dans l'urgence.


* Tentative de prospective

Ainsi, que pouvons nous attendre de cette crise pour les années à venir ? Les difficultés dans lesquelles se retrouvent l’État français suffiront-elles à faire comprendre que la résilience face à une crise sanitaire passe avant tout par l'intégration et la protection en amont des populations les plus vulnérables ?


Ainsi deux types de scénarios sont possibles à l'issu de cette crise :


*Soit en 2020, après l'endiguement du Coronavirus, la situation continue à stagner pour les sans abris et l’État s'engage à ne donner de réponses concrètes qu'en situation d'urgence, notamment en cas de grand froid. Ainsi à l'horizon 2030, la France qui fera face à une potentielle crise du logement verra le nombre de SDF se multiplier dans ses rues. Dès lors en 2045, les centres d'aide et d'hébergement seront ainsi surchargés par le nombre de demandes. Et par la même en 2050, lorsqu'une énième crise sanitaire surgira, l’État français se retrouvera alors au bord de la crise humanitaire où les inégalités criantes décideront les premières, des personnes à aller sur le front de cette nouvelle « guerre ».


*Ou Soit en 2020, l’État tire des leçons de cette crise et prend conscience de l'absolue nécessité de protéger les populations les plus fragiles face à de telles menaces, en décidant d'augmenter les efforts pour les aider. A l'horizon 2030, déjà, le budget de l’État alloué pour la lutte contre la pauvreté et la précarité s'augmentera, ce qui permettra une plus grande efficacité du Plan« Logement d'abord » et une diminution réelle du nombre de S.D.F dans la rue. L’État pourra de plus établir un Plan Sanitaire de Prévention et d'Urgence pour encadrer l'aide à apporter aux SDF en cas de nouvelle crise à l'image des Plans de Préventions des Risques ou encore des Dispositif Orsec qui permettent de prendre les mesures nécessaires en amont, pendant et après la crise. Dès lors en 2045, on assistera donc à la mise en place non seulement d'une plate-forme sociale tournante efficace pour aider les personnes qui se retrouvent sans domicile fixe. Mais aussi à la création d'un réel réseau de solidarité pour venir en aide à ceux qui vivent dans des conditions précaires. C'est ainsi qu'en 2050, l’État pourra assurer une protection concrète aux populations vulnérables face à la survenue de crises sanitaires majeures, et permettre ainsi un meilleur vivre ensemble pour une société plus bienveillante et résiliente.


Le deuxième scénario est donc beaucoup plus désirable. Mais surtout ce dernier s'avère nécessaire. En effet, prendre en compte ces populations et leur apporter des solutions concrètes est un impératif dans le contexte actuel du réchauffement climatique. En raison de la création des îlots de chaleurs dans les villes, mais aussi face aux vagues de canicules de plus en fréquentes, les villes se convertissent en véritables enfers, et les rues en charbons ardents. Dans cette situation, les sans abris sont les premières victimes impactées faute d'un faible accès à l'eau potable et aux problèmes de déshydratation. Or pour une résilience globale du territoire français, l'ensemble de la population doit être prise en compte.

Que ce soit donc face à une crise sanitaire de la même ampleur que celle provoquée par le COVID 19 ou que ce soit face à une crise climatique, l’État ne peut plus faire l'impasse sur les populations les plus pauvres et les plus démunies. La résilience passe d'abord par l'aide apportée à ceux qui en ont le plus besoin, sachant que la vulnérabilité individuelle conduit à la vulnérabilité collective.


Anaïs NAZE



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