Théâtre en l'air : sensibilisation et participation par l’art

Au cœur de la campagne picarde, une petite troupe de théâtre itinérante propose d’écrire une autre histoire culturelle des territoires ruraux. Voyageant dans toute la Picardie, la troupe du Théâtre en l’Air, créé par Cécile Demonchy en 1997, a installé ses quartiers dans un ancien corps de ferme d’Abbeville Saint Lucien, à 10km au nord de Beauvais dans un lieu d’accueil et d’animation mais aussi de création, notamment des costumes, décors et éléments utilisés dans les pièces proposées. Organisé autour de la cour et du jardin, le lieu est le point d’attache d’une troupe proposant des ateliers d’initiation théâtrale à une grande diversité de public, visant à sensibiliser aux pouvoirs libérateurs de l’art, du travail du corps et de l’expression des émotions. Les interventions en école constituent le deuxième pilier de leurs activités, permettant de toucher les publics scolaires de milieux ruraux, souvent éloignés de la culture et de sa pratique.

Au-delà des interventions ciblées en direction de groupes accueillis au sein du corps de ferme, la troupe va aussi à la rencontre des publics profitant notamment des événements ruraux, tels les portes ouvertes des fermes, notamment celles proposant de la vente directe, les fêtes de village ou encore les événements culturels proposés par les centres sociaux. Une rencontre directe avec un public divers et souvent peu coutumier des prestations théâtrales et ayant un accès fortement limité à la culture. Leur démarche s’inscrit ainsi en premier lieu dans un engagement social en faveur de la vie dans les villages, de leur dynamisme et de l’accès à la culture pour tous et toutes. Le processus de construction de leurs œuvres témoigne en lui-même de cette volonté de toucher des publics populaires et de valoriser les créations et traditions issues de ces groupes sociaux : le spectacle « Petite fille de l’hiver », inspiré d’un conte russe, de même que « Errances », proposant, dans un environnement clownesque, une scène de rencontre de deux marginaux aux langages différents. La musique rythme ces représentations : accordéon et guitare, deux instruments populaires et entraînant le spectateur en complicité avec les acteurs.

Leur démarche sociale ne peut cependant être séparée de leur engagement en faveur de l’écologie. L’intervention en milieu rural leur permet dans un premier temps de toucher des publics proches de milieux engagés notamment dans l’agriculture biologique. Leurs représentations visent ainsi à prolonger des actions de sensibilisation en passant par l’image, le jeu et le rire. « Le Temps selon Marguerite » est un exemple de leurs réalisations visant à sensibiliser des publics variés aux questions de l’agriculture durable, de l’habitat léger et du recyclage via le parcours d’une femme, de son fils et de son chat se déplaçant en roulotte à la recherche d’un mode de vie alternatif. Le spectacle se clôture par une atelier musical participatif proposant à chacun et chacune de proposer ses rythmes, de danser et de chanter, notamment dans le registre des chansons populaires. Social et environnemental sont ainsi intimement liés, permettant de proposer une écologie inclusive, participative et populaire.

Au-delà des œuvres proposées servant la sensibilisation environnementale et le lien social, la démarche d’itinérance des artistes et leur mode de vie s’inscrit à plein dans leur engagement écologique. Les tournées se font ainsi à vélo et en calèche, dans une optique de réduction de l’empreinte carbone de l’activité. L’attention portée à l’impact des déplacements et de la création est particulièrement significative en milieu rural.

La compagnie composée d’une dizaine de membres allie ainsi engagement environnemental et social dans des spectacles musicaux, participatifs et accessibles.

Corentin Cnudde